Fabienne Grebert

Fabienne Grebert

Exclusion de Pierre Larrouturou : une épreuve ou une chance ?

En tant qu’élue Nouvelle Donne, je m’étais mise en retrait des derniers rebondissements au sein du parti. Devant les prises de position des uns et des autres, les infractions aux règles du jeu posées par le Centre des Interrelations, je me sens le devoir de sortir de ma réserve et de vous communiquer ce que l’exclusion de Pierre Larrouturou m’inspire. Certains y verront la fin du parti, d’autres une chance. Tout dépend de notre capacité à sortir de cette crise par le haut, à rester solidaires et à démontrer l’ambition de Nouvelle Donne : celle d’un parti, intègre, capable de faire respecter ses valeurs et son éthique; un parti tenu par ses militants qui n’a pas besoin d’un homme providentiel pour faire vivre son projet.

 

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Du besoin d’une gouvernance participative

La première fois que j’ai rencontré Pierre Larrouturou, c’était à Amiens il y a deux ans, aux journées d’été de ND. Je venais d’intégrer l’équipe d’architectes chargée de co-construire les nouveaux statuts du parti. Démocratie directe, un groupuscule minoritaire au sein de ND remettait en question la gouvernance du parti. Un conseil national provisoire se tenait à côté de notre réunion, visiblement dans une ambiance tendue. Je me souviens des propos de certains membres, enjoignant Pierre Larrouturou de faire preuve de fermeté et d’affirmer une ligne claire quant à la légitimité de l’équipe d’architectes. A cette époque déjà, dans les couloirs certains se souviendront de la tendance de Pierre à se présenter en victime, à dire qu’il ne pouvait pas faire autrement et il se fit tirer l’oreille pour ne pas laisser tribune libre à Démocratie Directe et soutenir le processus de co-construction des statuts. Ce jour là, je m’étonnais de l’absence de certains membres fondateurs de Nouvelle Donne, à l’instar de Bruno Gaccio que je ne reverrai plus dans aucune réunion (Curieux pour un si jeune parti tout enorgueilli de son bon score aux européennes). Les membres du Conseil National  nous pressaient, pour mettre en place des statuts qui contribuent à une gouvernance plus participative et à limiter les pouvoirs du Président.  L’urgence aura été fatale et après le départ de Patrick Beauvillard, à l’origine de la démarche et membre du CN, nous n’avons pas pu engager une concertation plus construite avec les membres restants. Celle-ci nous aurait permis de mieux formaliser la place du Président, d’installer une gouvernance cohérente et unie, susceptible de constituer un contre-pouvoir, face à un président tout puissant. Il aura fallu de nouveaux statuts et un nouveau BN pour y parvenir. Cette nouvelle instance  a su endosser le rôle le 27 août dernier, face à un chef qui a, semble-t-il, oublié les règles élémentaires de démocratie propres à Nouvelle Donne.  

 

 

Des petites anecdotes de campagne qui continuent de semer le doute

Des membres fondateurs qui se dispersent, des attentes pour mieux encadrer le rôle du Président dans les statuts, … Depuis deux ans, plusieurs signes annonçaient la crise que ND connait aujourd’hui. . Tout le monde se souviendra entre autre de la démission de soixante militants et responsables en juin 2015. Dans cette période, à Lyon, une équipe de militants engagés et brillants a tenu la barre pour constituer des listes de Rassemblement en Auvergne Rhône-Alpes et négocier des places éligibles à Nouvelle Donne. J’eu l’honneur d’être tête de liste en Haute-Savoie. J’ai demandé le soutien de Pierre Larrouturou qui me l’a accordé et qui est venu participer à une réunion publique à Annecy. Il m’expliqua à cette occasion que Nouvelle Donne était en pleine renaissance, qu’il participerait à une primaire à gauche et qu’il allait « exploser » Hollande aux Présidentielles… J’aurais pu me réjouir de ce scénario, mais il ne me semblait pas en phase avec l’état des finances de Nouvelle Donne.

 

Je venais de payer le billet de TGV de Pierre car ni le parti, ni lui n’avaient les moyens d’y subvenir. Les frais inhérents à son déplacement ne pouvaient être pris dans les comptes de campagne, car il n’était pas candidat. Pour les mêmes raisons financières, je lui proposais de loger à mon domicile. Pierre préféra un hôtel 3 étoiles, qu’il quitta le lendemain sans payer la note. C’est donc moi qui l’ai assumée personnellement. De là à penser que Pierre n’accorde aucun respect à ses adhérents, et qu’il est bien plus animé par son projet personnel, il n’y a qu’un pas, que je laisserai à chacun le soin de franchir, ou pas.

 

Transformons la crise en opportunité !

Qu’attendons-nous de plus ? Un nouveau BN, de nouveaux statuts qui limitent le pouvoir du BN ? Pourquoi croire à nouveau que Pierre va changer, victime incomprise des instances du parti, inconscient de ses propres limites? Les membres de l’Assemblée Citoyenne du week-end auront mieux à faire que de discuter du bien-fondé de cette exclusion. Tout le monde se saisit aujourd’hui de la question du partage du temps de travail, du changement climatique et si nous continuons à nous regarder le nombril, ce débat se fera sans nous. Ce qui nous distingue aujourd’hui, c’est l’ancrage citoyen de Nouvelle Donne. Je voudrais d’ailleurs rendre hommage et féliciter les militants qui se démènent depuis 2013 pour animer le parti, constituer le programme et faire campagne. C’est aussi pour eux qu’il faut continuer l’aventure. Ca ne sera pas facile, mais si Pierre s’y associe, nous savons que le combat est perdu d’avance.

« Le talent ne fait pas le leader », disait les soixante démissionnaires dans leur tribune Mediapart du 21 juin 2015, en citant Pierre Larrouturou. Nous avons aujourd’hui l’opportunité de nous passer de notre homme providentiel. Je ne suis pas naïve, ce choix nous sera peut-être fatal. Mais nous pouvons incarner aussi notre capacité à faire de la politique autrement, à nous débarrasser des combines, des petits arrangements avec la loi et des règles de financement des partis. Nous gagnerons à être connus pour cela. Et si notre programme est cohérent, crédible, ce dont je n’ai aucune doute, compte-tenu des compétences que j’ai pu croiser chez Nouvelle Donne, nous donnerons peut-être envie à nos adhérents perdus, à nos fondateurs, à quelques personnalités et figures charismatiques de nous rejoindre et d’épauler le premier parti citoyen de France. Telle doit être notre ambition collective, telle doit être la feuille de route que nous devons construire ensemble, dès l’Assemblée citoyenne de samedi prochain.

 

 

Fabienne Grebert

Conseillère régionale Nouvelle Donne en Haute-Savoie



08/09/2016
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